
Toute anesthésie (injectable, volatile ou partielle) nécessite un accès veineux et un accès aux voies respiratoires. Ces deux lignes de vie sont des incontournables de l’anesthésie, indépendamment du protocole choisi.
Une << prémédication efficace >> sous-entend un protocole qui permet la manipulation douce et respectueuse de l’animal sans contraintes ou force. Une fois cet objectif atteint, il est possible de poursuivre l’anesthésie avec une induction intraveineuse (certainement la meilleure) et ainsi doser à effet le produit anesthésiant utilisé.
Exemples de prémédications efficaces: Alpha2-agoniste + Benzodiazépine + Opioïde
Ici le choix de l’alpha2-agoniste a été effectué envers la médétomidine, mais il est possible d’utiliser la dexmédétomidine avec les mêmes attentes.
Il faudra juste en diviser la dose par deux (en µg/kg).
• Les alpha2-agonistes sont contre-indiqués lors de dysfonction cardiaque à l’éjection systolique.
• Les dissociatifs sont contre-indiqués lors de cardiomyopathie hypertrophique et lors de gestation.
• L’opioïde est à choisir en fonction des besoins et objectifs.
Le Zoletil® est une formulation combinant la tilétamine et le zolazépam, une benzodiazépine. Cette association synergique optimise l’effet anesthésique en :
• Atténuant l’hypertonus musculaire induit par le dissociatif
• Modulant les effets neuropsychologiques de la dissociation
• Induisant une probable amnésie antérograde
Cette combinaison s’avère particulièrement adaptée à l’anesthésie des lagomorphes et d’autres petits mammifères.
Ces protocoles doivent être considérés comme des points de départ et des suggestions pour réfléchir à comment construire une stratégie d’anesthésie adaptée, non pas comme des recettes ubiquitaires.
L’anesthésie dissociative avec Zoletil®

La dissociation est un état d’inconscience caractérisé par une déconnexion partielle entre le système nerveux central et l’environnement externe, tout en préservant certaines fonctions physiologiques de base. Les agents dissociatifs, tels que la kétamine et la tilétamine, induisent cet état en agissant principalement comme antagonistes des récepteurs N-méthyl-D-aspartate (NMDA).
La tilétamine, structurellement similaire à la kétamine, présente une durée d’action prolongée et une analgésie périphérique, peut-être plus prononcée. Cette caractéristique pharmacocinétique peut être avantageuse dans certaines situations cliniques, notamment chez les espèces au métabolisme rapide ou lorsque les contraintes matérielles limitent l’administration répétée de médicaments.
Zoletil® est une formulation combinant la tilétamine et le zolazépam, une benzodiazépine. Cette association synergique optimise l’effet anesthésique en :
- Atténuant l’hypertonus musculaire induit par le dissociatif
- Modulant les effets neuropsychologiques de la dissociation
- Induisant une probable amnésie antérograde
Cette combinaison s’avère particulièrement adaptée à l’anesthésie des lagomorphes et d’autres petits mammifères, comme en témoigne la littérature scientifique abondante sur le sujet. Cependant, les récentes évolutions de la pharmacologie anesthésique actuelle nous permettent d’améliorer grandement le potentiel de protocoles anesthésiques jusqu’à présent utilisés et d’en optimiser leur usage.
De ces faits, les combinaisons et les associations qui peuvent être crées avec Zoletil® sont multiples et toutes ont comme avantage, de limiter les effets indésirables en préservant les objectifs anesthésiques recherchés.
Voici une courte description des avantages et inconvénients intrinsèques aux molécules qui pourraient être associées à Zoletil® pour en améliorer l’usage.
Effets cardiovasculaires
Ces effets sont obtenus rapidement, avec un délai d’action d’environ 30 secondes par voie intraveineuse et 10 à 20 minutes par voie intramusculaire. L’effet analgésique dure généralement 40 à 60 minutes, tandis que l’effet sédatif peut persister 1 à 2 heures.
Les alpha2-agonistes sont principalement utilisés pour :
- La sédation lors d’interventions mineures
- La prémédication avant une anesthésie générale
- L’analgésie, notamment dans le cadre d’une approche multimodale
- Leur utilisation permet souvent de réduire significativement les doses d’autres agents anesthésiques nécessaires
Malgré leurs avantages, les alpha2-agonistes présentent des effets secondaires importants à considérer :
- Dépression cardio-respiratoire marquée
- Bradycardie sinusale (réduction de 40 à 50% de la fréquence cardiaque)
- Hypertension initiale suivie d’hypotension
- Bradypnée
- Risque d’œdème aigu du poumon sur des patients ne pouvant pas tolérer des résistances à l’éjection ventriculaire gauche
- Vomissements peu après l’administration
En raison de ces effets, leur utilisation est généralement limitée aux animaux dont le risque anesthésique ASA est ≤ 2-3.
Évolution des pratiques
Récemment, on observe une tendance totalement justifiée, à la réduction des doses d’alpha2-agonistes utilisées, notamment grâce :
- au développement de nouvelles spécialités morphiniques vétérinaires
- à l’utilisation accrue de l’anesthésie volatile
- à la sage association entre molécules (notamment les dissociatifs)
Cette approche permet de maintenir les bénéfices des alpha2-agonistes tout en minimisant leurs effets secondaires.
En cas de nécessité, les effets des alpha2-agonistes peuvent être rapidement inversés par l’administration d’antagonistes spécifiques tels que l’atipamézole, mais cela n’est qu’une possibilité et ne doit pas être considéré comme le « modus operandi ».
Les phénothiazines
L’acépromazine (seul représentant en médecine vétérinaire) est un tranquillisant qui a été largement utilisé dans le passé, principalement chez les chiens, les chats et les chevaux. Cette phénothiazine agit comme antagoniste des récepteurs dopaminergiques, induisant une sédation dose-dépendante, sans effet analgésique significatif. Elle est employée pour l’apaisement, la prémédication anesthésique et la gestion du mal des transports. L’acépromazine présente des effets secondaires à prendre en compte, notamment une dépression cardio-respiratoire, une hypotension et une hypothermie. Son utilisation nécessite des précautions particulières, surtout chez les animaux affaiblis ou atteints de troubles hépatiques et il serait bénéfique (mais pas obligatoire) de l’associer à des molécules « stimulantes » du système cardiovasculaire (comme les dissociatifs, par exemple). La dose doit être ajustée en fonction de l’espèce, de la race et de l’état de santé de l’animal, avec une attention particulière pour les chiens porteurs de la mutation ABCB1-1Δ (MDR1) qui nécessitent d’une réduction globale des anesthésiques utilisés.
Les opioïdes
Les opioïdes sédatifs jouent un rôle crucial en médecine vétérinaire, notamment dans la gestion de la douleur et l’anesthésie. Parmi les molécules couramment utilisées, on trouve la buprénorphine, le fentanyl, le butorphanol et la méthadone. A part le fentanyl (cité en littérature pour la sédation mais rarement utilisé à cet effet à cause de ses effets dysphoriques), ces agents procurent une analgésie variable (très légère pour le butorphanol et la buprénorphine et bien plus puissante pour la méthadone). Leur administration peut se faire par voie intraveineuse, intramusculaire ou sous-cutanée, avec des doses ajustées selon l’espèce et l’individu. Leur usage doit être choisi attentivement pour bien prendre en compte leur valence analgésique et l’adapter soigneusement. Les opioïdes sont souvent utilisés dès la prémédication anesthésique, permettant de réduire les doses d’autres agents anesthésiques. Cependant, leur utilisation nécessite une surveillance étroite en raison de potentiels effets secondaires tels que la dépression respiratoire, la sédation excessive et l’hypotension en cas de bradycardies sévère. Encore une fois, une excellente occasion pour les associer aux dissociatifs.
Comment optimiser l'usage Zoletil® dans la pratique moderne de l'anesthésie.
Du fait de ses caractéristiques uniques, le Zoletil® peut être utilisé de diverses façons. Comme agent de contention chimique (par exemple lors d’une injection intramusculaire), comme co-inducteur de l’anesthésie par voie intraveineuse (par exemple en association avec du propofol), comme co-anesthésique (lors d’une simple induction et relais aux agents d’anesthésie volatile).
La plasticité des dissociatifs se prête à un usage très varié, de la contention chimique pour arriver à l’induction en passant par l’analgésie (antagonistes des récepteurs NMDA). Cela en gardant une grande partie des réflexes « protecteurs », maintenus par les dissociatifs (à différence de la dépression dose-dépendante induite par les anesthésiants).
Zoletil® présente une caractéristique unique concernant sa durée d’action, supérieure à celle de sa cousine la kétamine. Cette caractéristique est liée à ses propriétés pharmacologiques et pharmacocinétiques. Elles sont, partiellement, dépendantes de la dose administrée à l’instant zéro et des doses administrées dans le temps (bolus répétés). Si l’on souhaite garder les avantages de Zoletil® mais en réduire la durée d’action, alors il est préférable d’en réduire la dose administrée « globalement ». Pour cela, plusieurs stratégies se présentent :
- Réduire la dose initiale en l’associant à d’autres produits sédatifs/analgésiques
- Ne pas répéter de bolus
- Associer une technique PIVA (Partial IntraVenous Anaesthesia) autrement dit : une anesthésie injectable pour l’induction et maintenue par les agents volatils.
En fonction de l’espèce, des objectifs et des méthodes de travail, les dosages peuvent être très variés.