Pharmacocinétique et pharmacodynamique ex vivo de l’administration orale de firocoxib chez le lapin blanc néozélandais.
Pharmacokinetics and ex vivo pharmacodynamics of oral firocoxib administration in New Zealand White rabbits (Oryctolagus cuniculus) Sara Gardhouse, Michael Kleinhenz, Samuel E. Hocker, Mikaela Weeder, Shawnee R. Montgomery, Anna Porting, Tess Rooney. AJVR
Introduction
Les antiinflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont des molécules importantes dans la prise en charge des pathologies et douleurs inflammatoires. L’action principale des AINS est l’inhibition des enzymes cyclooxygénases (COX).
Il existe trois isoformes des enzymes COX : COX-1, COX-2 et COX-3. Les COX-1 sont exprimées dans un grand nombre de tissus et leur activité est responsable de la production de prostaglandines cytoprotectives qui sont critiques dans la maintenance de l’intégrité de la muqueuse gastrique, dans la maintenance de la perfusion rénale ainsi que le débit de filtration glomérulaire et la production de précurseurs de la synthèse de thromboxane (permettant l’agrégation plaquettaire).
La COX-2 est une enzyme qui joue un rôle dans l’inflammation et les néoplasies. Plusieurs des effets secondaires (toxicité rénale, inhibition plaquettaire, ulcération gastrique) des AINS sont dus à l’inhibition des COX-1. Les différents AINS utilisés en médecine sont soit inhibiteurs non sélectifs (anti COX-1 et COX-2), soient anti COX-2 préférentiels soient anti COX-2 sélectifs.
Il a été démontré que les AINS anti-COX-2 sélectifs entrainent moins d’effets secondaires que les AINS non sélectifs.
Le firocoxib est un AINS 384 fois plus sélectif COX-2 que COX-1 qui est utilisé chez les carnivore domestiques et les chevaux pour contrôler la douleur inflammatoire dans le cadre d’arthrose. A cause des différences de métabolismes des espèces, avant d’utiliser une molécule chez une nouvelle espèce, il est important de connaitre les propriétés pharmacocinétiques et pharmacodynamiques chez cette espèce cible. En ce qui concerne les études d’effets in vivo, le dosage des thromboxane B2 (TXB2) pour les COX-1 et celle des prostaglandines E2 (PGE2) pour les COX-2 ont démontré leur intérêt comme marqueur de substitution.
L’objectif de cette étude est d’évaluer la pharmacocinétique d’une administration orale unique de firocoxib chez le lapin et de doser les TXB2 et PGE2 sériques afin d’évaluer l’inhibition des COX-1 et COX-2 respectivement.
Matériel et méthodes
Six lapins, 3 males et 3 femelles ont reçu un quart de comprimé de 57mg de firocoxib (Previcox® Boehringer Ingelheim), administré avec un distributeur de comprimé pour chat suivi de l’administration de 3mL d’eau. Des prises de sang d’un volume de 1mL ont ensuite été réalisées tout de suite après l’administration puis à 0,5, 1, 1.5, 2, 4, 6, 8, 12, 24, et à 48h après administration pour doser le firocoxib.
Additionnement 0,5 mL de sang ont été prélevés à 2, 4, 8, 12, 24, et à 48h afin de doser les TXB2 et PGE2. Les lapins ont été surveillés afin de vérifier l’absence d’effets secondaires sur la vigilance, l’appétit, la prise de boisson, la production d’urine et de selles.
Résultats
Au cours de l’ensemble de la procédure expérimentale, aucun lapin n’a présenté d’effets secondaires. Concernant les paramètres pharmacocinétique, la concentration plasmatique maximum (Cmax) était de 0,16µg/kg, le temps pour atteindre la concentration plasmatique maximum (Tmax) était de 3,81h et la demi-vie était de 9,12h. La réduction maximum des PGE2 était d’un peu moins de 50% et fut atteint à 12h après administration. La réduction maximum des TXB2 était d’environ 25% et fut atteinte à 48h après administration.
Discussion
Parmi les AINS, le meloxicam est celui qui est le plus utilisé chez le lapin. Peu d’effets secondaires sont rapportés dans la littérature à l’exception d’un cas clinique d’ulcère gastrique.
En comparant les données de pharmacocinétique du firicoxib chez le lapin aux autres espèces, il peut être noté que Tmax est plus court chez le chien (Tmax= 1,25h), mais est proche de celui du cheval (Tmax=3,2h). La concentration plasmatique maximum était plus forte chez le lapin que chez le chien (Cmax=0,52µg/mL), mais plus faible que chez le cheval (Cmax=0,058µg/mL). De même, chez le lapin, la demi-vie est plus courte que chez le chien mais plus longue que chez le cheval. L’élimination des molécules et de leurs métabolites se fait par biotransformation du principe actif suivie via une excrétion rénale ou biliaire. Il est connu qu’il existe des différences entre les espèces et par exemple, les lapins possèdent une mauvaise excrétion biliaire ce qui peut expliquer des différences significatives des paramètres pharmacocinétiques d’une espèce à l’autre. Si l’élimination de la firocoxib se fait majoritairement par voie urinaire, une partie se fait par voie biliaire ce qui peut expliquer les différences de résultats entre le lapin et les autres espèces mises en évidence par cette étude. Un autre point à prendre en compte est le métabolisme basal des animaux avec en règle générale les animaux plus petits ayant un métabolisme plus élevé et donc nécessitant des doses de molécules plus élevées.
Les résultats ont montré que les effets anti COX-2 du firocoxib étaient plus importants que les effets COX-1 chez le lapin. Chez le chien, il a été montré que les effets anti inflammatoires étaient atteints entre 30 et 67ng/mL de concentration plasmatique de firocoxib. Ce niveau était atteint chez les lapins de cette étude entre 0,5 et 2h et a duré 24h. Cependant en analysant les données de pharmacodynamique la courbe de dosage des PGE2 suggère que la dose testée n’est pas suffisante. Des études multidoses ont été réalisées chez le cheval et montrent une propriété bioaccumulative de cette molécule chez cette espèce. Il serait intéressant chez le lapin de réaliser des études multidoses afin d’étudier la bioaccumulation et la toxicité.
A retenir
L’administration de firocoxib à 14,25mg/Kg par voie orale chez le lapin a permis d’atteindre les concentrations plasmatiques thérapeutique chez le chien, mais pas de de niveau suffisant d’inhibition de de COX-2. Aucun effet secondaire n’a été observé au cours des manipulations. Cette étude suggère que le lapin nécessite une dose plus élevée que 14,25mg/Kg par voie orale de firocoxib afin d’apporter un effet anti inflammatoire efficace.
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