Schéma de prescription de médicaments 
chez les NAC et la faune sauvage : 
étude rétrospective dans un hôpital 
universitaire vétérinaire espagnol de 2018 à 2022
				Références article :
Drug prescription pattern in exotic pet and wildlife animal practice: a retrospective study in a Spanish veterinary teaching hospital from 2018 to 2022. Romero B, Susperregui J, Sahagún AM, Fernández N, López C, de la Puente R, Altónaga JR, Díez R. Front Vet Sci. 2024 Jan 8;10:1328698.Résumé réalisé par le Dr Vet. Charly Pignon pour CAPdouleur – Juillet 2025
Introduction
La médicalisation croissante des nouveaux animaux de compagnie (NAC) et des animaux sauvages suscite des défis spécifiques en termes de diagnostic, de gestion thérapeutique et de prescription médicamenteuse. Les différences anatomiques, physiologiques et comportementales entre espèces, associées au manque de données pharmacocinétiques et de médicaments possédant des AMM, complexifient la prescription. De plus, la problématique de l’antibiorésistance est cruciale dans le contexte « One Health ».
Cette étude vise à décrire les schémas de prescription médicamenteuse chez les NAC et animaux sauvages admis dans un hôpital vétérinaire universitaire espagnol sur une période de cinq ans, en mettant l’accent sur les classes pharmacologiques employées, la diversité des prescriptions et les pratiques vis-à-vis des antibiotiques.
Matériel et méthodes
L’étude rétrospective a été menée au Veterinary Teaching Hospital de l’Université de León (Espagne), sur la période du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022. Les dossiers médicaux de tous les NAC (oiseaux, mammifères, reptiles) et animaux sauvages suivis pendant cette période ont été extraits du logiciel GestorVet. Pour chaque animal, les données réunies comprenaient l’espèce, le motif et le type de visite (urgence ou consultation), la durée et le type d’hospitalisation, les diagnostics, le devenir (sortie, hospitalisation, euthanasie), ainsi que l’ensemble des traitements prescrits (substance active, classe, posologie, voie et durée d’administration). Les médicaments ont été classés selon la nomenclature anatomique-thérapeutique-chimique (ATCvet) de l’OMS ; les antibiotiques selon la catégorisation EMA (A à D). Les statistiques descriptives, les odds ratios (OR) et les analyses multivariées par régression logistique ont été utilisées pour analyser les facteurs associés à l’euthanasie et à la prescription d’antibiotiques. La diversité de prescription (PD) a également été calculée.
Résultats
Sur 17 483 dossiers médicaux consultés sur cinq ans, 1 420 concernaient des NAC et animaux sauvages. Après application des critères d’inclusion, 503 animaux (427 oiseaux, 71 mammifères, 5 reptiles) et 1 081 traitements distincts ont été analysés. Les oiseaux, principalement des rapaces et des oiseaux de compagnie, constituaient la majeure partie des admissions. La très grande majorité des visites était motivée par une urgence (79,5%) ; la proportion d’admissions a progressé d’environ 195% sur la période étudiée. Les oiseaux présentaient une probabilité 22 fois plus élevée que les mammifères d’être admis pour une urgence (OR=22,1). Le taux d’hospitalisation (50,9%) et d’euthanasie (34,0%) était particulièrement élevé, en lien avec la gravité des tableaux cliniques, en particulier sur les atteintes musculosquelettiques (59%) et digestives (22,3%).
Concernant la prescription, près de la moitié des médicaments appartenait à la classe QN (système nerveux), principalement utilisés pour la sédation et l’euthanasie. Les molécules les plus prescrites étaient le pentobarbital (187 animaux, dont 171 euthanasies), l’isoflurane, le meloxicam (principal anti-inflammatoire non stéroïdien) et les solutions électrolytiques. Chez les opioïdes (QN02), la buprénorphine était le premier choix, suivie du tramadol, butorphanol et méthadone. Les opioïdes étaient administrés majoritairement en injection, principalement chez les oiseaux.
Les anti-inflammatoires prescrits étaient quasi exclusivement le meloxicam (QM01AC), massivement employé de façon injectable (79,2%) et principalement chez les oiseaux. Robenacoxib n’a été utilisé que marginalement chez les mammifères.
Les prescriptions d’antibiotiques concernaient 12,5% des traitements, dominées par les quinolones (marbofloxacine), suivies des sulfamides, bêta-lactamines et macrolides. Selon la classification EMA, l’immense majorité était en catégorie B (Restrict). La voie d’administration principale était parentérale (62,9%), suivie de la voie orale (30,1%). Les facteurs associés à la prescription d’antibiotiques étaient les hospitalisations, l’espèce mammifère, les motifs hors urgence, et des atteintes autres que musculosquelettiques ou digestives.
Discussion
Cette étude est la première à décrire sur une période prolongée les schémas de prescription médicamenteuse en structure hospitalière vétérinaire pour NAC et animaux sauvages. Les oiseaux représentent la majorité des consultations, principalement en contexte d’urgence, expliquant le haut taux d’euthanasie et l’utilisation fréquente de sédatifs et d’agents euthanasiques. Cependant ce résultat est biaisé par la présence majoritairement d’oiseaux de la faune sauvage qui sont souvent retrouvé blessés plusieurs jours après que le trauma ne survienne. Les opioïdes et anti-inflammatoires non stéroïdiens (en particulier meloxicam) sont également largement utilisés, traduisant la prévalence élevée des syndromes douloureux musculosquelettiques.
La prescription d’antibiotiques, dominée par la marbofloxacine, souligne une préoccupation majeure relative à l’antibiorésistance, compte tenu d’un usage fréquent des molécules critiques classées en catégorie B. Le hors AMM reste la norme en l’absence de spécialités vétérinaires homologuées pour ces espèces, ce qui accentue la nécessité de guides fondés sur les preuves et de politiques de recommandations adaptées à la médecine des NAC.
Enfin, le faible taux de diversité de prescription antibiotique illustre l’absence de recommandations robustes pour ces espèces et la tendance à utiliser systématiquement certaines familles, ce qui pourrait favoriser l’émergence de résistances. Ces résultats invitent à une réflexion sur la surveillance des prescriptions et la formation des vétérinaires à une utilisation raisonnée des anti-infectieux et antalgiques chez les NAC.
À retenir
Cette étude rétrospective sur cinq ans détaille les prescriptions médicamenteuses pour NAC et animaux sauvages dans un hôpital universitaire espagnol. Les oiseaux dominent les consultations (principalement représentées par la faune sauvage), essentiellement en urgence. Les traitements incluent surtout des antalgiques avec dans l’ordre d’importance d’utilisation : meloxicam, buprénorphine, tramadol, méthadone, butorphanol, et les antibiotiques, avec majoritairement de la marbofloxacine, ce qui soulève des questions de santé publique quant aux enjeux de résistance.


